Récit des 100 bornes de Millau 2017 avec mon accompagnateur Rémy
Nous
voilà repartis pour une édition Millavoise 2017 riche en émotions et en
plaisir, nous étions 1600 100 bornards et 500 marathoniens à nous
élancer au son du pistolet de Laura Flessel ministre des sports qui
venait briser le silence qui s’était installé sitôt que la fanfare
s’était tue. Cette fanfare, que j’avais tant aimée l’an dernier. Elle a
joué la marche des fêtes d’Ainhoa, petit bled aussi charmant que pentu
du Pays basque d’où provient Lulu, petite femme rieuse aux yeux plus
pétillants qu’un crémant de Limoux.
Ma résolution de l’année était
de rester sage, de suivre et de ne pas partir seul devant. Cette
résolution, je l’ai tenue, environ 250 mètres. J’étais en tête. Si l’on
excepte les motards les vélos, et la présence tellement gratifiante du
public amassé le bord de la route, j’étais seul. J’étais seul car je
n’avais pas encore mon accompagnateur. Mon Rémy que j’allais rejoindre
au kilomètre 7. En attendant j’étais fasciné, par tous ces gens qui
bravaient la pluie pour soutenir leurs proches amis, ou simplement
encourager des inconnus. J’étais aussi fasciné par la montre, l’un de
ces (trop) nombreux outils (devenus) indispensables à tout coureur qui
se respecte, et avec laquelle je ne cours que sur certaines courses.
Les
premiers kilomètres se passent, sous la pluie à un bon rythme, (à peu
près 3’50 pour les curieux), j’essaie de ne pas me cramer, comme me le
conseillent gentiment le directeur de course. Bientôt le premier
village, Aguessac et son premier ravitaillement. Je tape dans la main
d’un jeune et récupère un gobelet, tendu par l’un des nombreux jeunes
qui compose ce bataillon de volontaires dont les armes seraient des
sourires, des mots sympas, des tapes amicales pour chacun des coureurs.
A
la sortie d’Aguessac, c’est là que tout commence, on retrouve notre
accompagnateur vélo. On les voit, sur leurs montures nous attendre dans
le froid, les musettes pleines à craquer de de barres en tout genre, de
boissons énergisantes, et prêts à se battre contre le doute, le
renoncement qui s’abattra sur leur poulain. Rémy est reconnaissable à
son maillot rouge floqué de son surnom Rémyx le Gaulois. Il m’emboîte le
pas suivi de la voiture ouvreuse, des commissaires de course et des
cyclistes qui suivront le premier tout au long de la course. On se
dirige vers Rivière sur Tarn, pour le second ravitaillement où je me
saisis aussi d’un gobelet. MM, qu’est ceque ce goût déjà que j’ai
presque oublié pendant ma préparation ? du houblon ? C’est de la bière
Mille dieux !!* ( expression assez courante dans le sud-ouest,
remplace, le point, la virgule, le point d’exclamation, marque
l’étonnement, la colère la surprise, la joie, les buts du Téfécé (chose
rare il est vrai)… )
On chemine, on ne voit rien, parce que comme
tous les jours de l’année en Aveyron sauf le 15 Août entre 15 h 30 et 17
h, il ne fait pas beau. Il pleut, il fait froid il y a du brouillard,
on n’aperçoit malheureusement rien de ce beau pays. Premier semi
bouclé, ça commence à grimper. Nous voilà dans lancés dans la vraie
aventure millavoise !
Le groupe de cycliste nous suit toujours,
pendant qu’une moto caméra nous filme, il y a même la voiture de Totem
qui donne informe les auditeurs en temps réel. J’en profite pour
demander à Rémy s’il pourrait faire passer un message à l’un d’eux, qui
n’est autre que mon grand-père. « Le jeune Gabriel en profite pour
Saluer son grand-père René Fau à Montpezat fidèle auditeur de Totem »
La
pluie commence à se faire ressentir, les vêtements sont humides, les
jambes sont courbaturées, nous sommes toujours suivis et filmés, mais
derrière Jérôme Bellanca se rapproche à petits pas très rapides. Alors
je dis adissiatz à la caméra, il est temps de gérer si on veut arriver
en entier, je m’arrête sur le bas côté pour satisfaire un petit besoin
naturel, puis je prends le temps de regarder passer Bellanca, je
l’applaudis, il le mérite. Il ne sourcille pas, concentré qu’il devait
être sur son objectif. Deux autres concurrents passent Fabien Chartoire
et Cédric Gazulla « Allez jeune, accroche ! ». Toujours pas de Hervé
Seitz. Les cyclistes les motards, les voitures s’éloignent, je discute
avec un type, vous êtes cramés ? Oui et non, ils sont trop forts devant,
ils font que ça ! Les études, le travail, le vin rouge, ça aide pas
toujours ! Mais que voulez-vous il faut vivre à côté. Nous passons au
Marathon 2’56’’, je mange un peu, même s iRémy est impérial dans son
rôle d’accompagnateur. Maintenant tu es la tête et je suis les jambes.
Hervé
me double enfin ! Ce champion inspirant (cf ses récits de course) et
inspiré, (cf ses récits de course.. Il a déjà gagné deux fois, fait deux
podiums, porté haut les couleurs de la France aux 100 bornes de
Florence, et vient d’être appelé en équipe de France. « Allez Gabriel,
si tu as un autre T shirt change toi, tu peux marcher un peu dans les
côtes. » Je l’encourage à mon tour, je pense encore qu’il peut gagner !
Je délègue ma tête à Rémy, je ne suis plus que les jambes, il me
pousse, m’encourage, tous ceux qui me doublent aussi d’ailleurs. Il n’y a
pas d’animosité entre les 100 bornards. La haine n’existe pas ou plus.
Il n’y a pas de différence non plus, qu’importe votre âge, sexe
croyance, taille… Tout le monde va au bout de so, tout le monde s’impose
cette foulée suppliciaire dans le seul but de franchir la ligne. Il n’y
a rien à gagner : un Tshirt et un buffet campagnard. Pour le premier
comme pour le dernier.
Nous sommes dans la côte du viaduc quand je
pense à ça, une côte, enfin ? ou nooon ! Va falloir revenir courir au
Pays-Basque pour apprendre à grimper. On redescend direction Saint Rome,
on prend le temps de poser pour la photographe.
Elles sont là !!
Les tartines de pâté ! Depuis une semaine que je mange des pâtes ! J’en
prends deux ou trois et je continue ma route, toujours accompagné par
Rémy, mouillé, frigorifié, qui me soutient. Je commence à chanter, le
fameux des rillettes et du pâté, on tourne le disque, et sur la face B,
c’est Luis Mariano, et son rossignol, que le froid et la pluie
Aveyronnaise ont chassé. Les gens rient, alors moi aussi. Bientôt
Aurélien Connes me dépasse, il est Saint Affricain, il rentre au
bercail. Saint Affrique, petit village situé dans une cuve, où les
ravitaux sont biens fournis, (du friton !!). Il est accompagné d’une
foule (chez nous les foules commencent à partir du moment ou tu ne peux
plus rentrer tous ensemble dans une twingo, c’est-à-dire 8) d’une foule
de cyclistes, qui le poussent. Il sent l’écurie donc il accélère,
cependant il prend le temps de me glisser un mot sympa. Ces mecs là, ce
ne sont pas que des champions, ils sont hors-normes, des grands
Monsieurs !
On bifurque à droite après Saint Rome, et là ça grimpe.
La pente est sévère, elle me casse. Je marche, beaucoup. J’essaie de
courir parfois, de m’accrocher à trois jeunes cyclistes qui nous suivent
avec Rémy. On est là-haut dans le brouillard, et on descend là- bas
dans le midi (oui les musiques qui vous viennent à l’esprit sont parfois
surprenantes). Le temps de faire un sourire au photographe, aux
commissaires de course et aux organisateurs, qui se marrent, et on
repart, à bloc dans la descente.
Saint Affrique, qui contrairement à
ce que de vieux adages disent sur les aveyronnais n’est pas radin ! La
preuve, il y a deux F ! On tourne et vire dans les petites ruelles,
macarel, des fritons ! Allez une poignée pour mon gosier, je me suis un
peu dépensé aujourd’hui. On remonte, on double deux coureurs. Rémy est
toujours là et me donne à boire le « raisin » gourde avec du jus de
raisin de l’eau et du sel ! On monte on commence à croiser de plus en
plus de monde : « teh regarde le jeune, allez, bravo ! Je voudrais leur
dire merci à tous et les encourager aussi, Rémy le fait. On passe le 75
ème, et de nouveau le ravitaillement du haut de la côte de Tiergues.
Petit enchaînement Indochine Maître Gims par le DJ, qui dans ces
moments-là est jouissif. On redescend, on mange un type ! KM 80, ça sent
l’écurie, je vous le dis.
Saint Rome, qui vois-je, mon petit soleil
de la journée, ma Lulu qui m’attend ! « Allez mon cœur t’es le
meilleur » Elle a fait le déplacement (pour le plus grand bonheur du
trésor public, qui l’a prise en photo contre 90€ et 1 point) depuis le
var où elle travaille pour me voir ! Touche-moi la main je suis là. Je
voudrais lui faire un bisous, je dois puer être affreux à ce stade de
l’effort, je lui demande, m’arrête et l’embrasse. A côté on s’émeut
comme un troupeau de vaches affamées. J’ai pensé à elle presque toute la
course, elle m’a même suivi m’entraîner avec ce vélo sur lequel est
juché Rémy, finalement, c’est elle la meilleure…
On ne s’éternise
pas et on repart, direction Saint Georges, les jambes et les genoux
commencent à piquer sérieusement, mais comment s’arrêter quand en face
tout le monde vous encourage, alors même qu’il leur reste près de la
moitié de la course ? Un local en vélo nous suit, il m’encourage, je
serre les dents. Je pense soudain à une technique ancestrale qui
consiste à déplacer la douleur d’un point à un autre ! Bim, un grand
coup de boule à un panneau qui passait par là pour me remettre les idées
en place ! Bon résultat de l’opération, j’ai mal aux jambes, et j’ai
aussi mal à la tronche… Saint Georges, il pleut… c’est maussade saint
Georges, un samedi sous la pluie ? il y a de la musique, des cris, des
masseurs dont profitent ceux qui vont dans l’autre sens, des ravitaux en
saucisse lentilles, que je n’ai malheureusement pas goûtées… mais
surtout cette imperceptible odeur d’écurie, pour les chevaux que nous
sommes, alors on court et on donne tout ce qu’on n’a plus.
On grimpe
en claudiquant, passe sous le viaduc, on descend, et là Millau ! Le
pont , les voitures, les gens attablés en terrasse aux bars qui
applaudissent chaque coureur, Rémy qui me donne mon drapeau Occitan, la
caméra qui nous filme, les larmes qui montent, bientôt ce sera fini tout
ça, vous ne courrez plus mes chères petites jambes. On rentre dans la
cour de la salle des fêtes, Lulu est là déjà, elle m’accompagne pour ces
derniers mètres. Rémy pose le vélo et va m’attendre dedans.
On
monte le perron, et c’est fini. Le photographe photographie, l’annonceur
annonce, la Lulu rayonne, le Rémy est là et les gens applaudissent.
Je suis 14 ème en 8h 21, une heure plus vite que l’an passé.
On me tend le micro, vous êtes partis devant tous les grands ?
Vaut mieux partir devant parce qu’on sait qu’on finira derrière…
Je veux parler, exprimer ma gratitude, merci.
MERCI
MON REMY , tu as été le meilleur des accompagnateurs, tu m’as soutenu
et m’as poussé comme l’an dernier ma mère. Merci ma Lulu, d’être venue,
merci à vous les organisateurs et les bénévoles, cette course est
formidable. Je m’enquiers des résultats, et apprends déçu qu’Hervé a
fini quatrième. Il a été battu par de très grands Monsieurs.
On
parle un peu, avec cet ancien de Castel aux 162 marathons, avec ce
monsieur, qui nous avait doublé avant d’abandonner, vaincu par le froid.
Puis vient le massage, pour Rémy et moi, aux mains d’infirmières et
podologues du coin, qui s’amusent à prendre mes pieds en photo, car de
tels spécimens d’ampoules, c’est plutôt rare.
Vient enfin le moment
de la collation, on partage le buffet avec Danielle, une spectatrice,
avant notre départ pour Rodez, chez Margaux, une amie de Lulu, qui est
aussi la nôtre si elle le veut bien.
Vous trouvez que les 100 bornes
c’était démesuré ? Ce n’est rien, à côté de l’accueil de Margaux et
d’Anne, sa maman ! On débouche le rouge, on tartine le pâté, l’aligot
est bon, il file, (moins vite que Bellanca, certes), il y a du fromage,
de brebis en plus, des confitures de figues entières (si vous en voulez
merci de contacter Lulu, elle a récemment hérité de la recette), du
mousseux, du gâteau, une partie de belote. Et le lendemain, rebelote,
justement, on se réveille et déjà Margaux nous a cherché la fouace, les
croissants, le café… On se lève de table pour partir au restaurant,
Pantagruel lui-même eût été rassasié, une tartine, un magret (oui oui
entier), du gratin, de l’aligot, des frites, de la purée, du fromage
(beaucoup de fromage), du vin de nouveau de la fouace, et nous voilà
lestés pour rentrer à Narbonne-Plage, où je travaille et d’où j’écris ce
récit, après avoir fini la soirée assis dans la mer le sourire aux
lèvres à contempler l’horizon noir dans la nuit nuageuse.
Il ne me
reste qu’à vous remercier, de m’avoir lu (courageux les types !) mais
surtout à remercier ceux qui ont rendu ça possible, Ma famille d’abord,
avec ma Maman qui me pousse, et mon frère qui me suit parfois à
l’entraînement. Mon père et ma sœur aussi, ma Tante et mon Oncle qui me
laissent m’entraîner quand je travaille avec eux ; Patoche, Said, Marco
A2 Running et particulièrement Guillaume, avec qui je m’entraîne
parfois. Mes clubs, d’athlé avec son président Denis et tous ceux qui
oeuvrent pour que cela fonctionne, mon coach Frank.Frank Derrien et Séb
Bandu qui sont m’ont encouragé durant la course, vous aussi d’ailleurs !
Et
bien sûr le club de lutte, ma seconde famille, avec Patrick qui a formé
tant de jeunes qui sont eux de véritables champions, Aline et tout le
bureau, Jérôme qui est de nouveau Papa et tous ceux que j’oublie. Mes
derniers mots seront pour Lulu ma chérie et bien sûr Rémy, qui est la
moitié de cette aventure !!
Adissiatz !